MOHAMED-ABDI Kamansha

Consultations à domicile

Introduction

Proposer ce type de suivi thérapeutique aux personnes âgées dépendantes notamment, présente de nombreux avantages; non seulement pour la psychothérapie en elle même, mais aussi pour la personne qui en a besoin.

En effet, le premier avantage de la consultation à domicile est l’absence de déplacement pour la personne âgée. En fonction de ses facultés mentales et physiques, il peut être complexe pour une personne âgée et/ou dépendante de quitter seule son domicile. L’idée même de se déplacer dans un lieu inconnu peut être vécu comme décourageant et/ ou anxiogène.

De plus, la demande d’aide auprès de ce public est très souvent formulée par l’entourage, l’aidant, et non pas par la personne âgée elle même; à juste titre, en fonction d’un état psychique qui se détériore, ou simplement du fait qu’une personne âgée n’a pas toujours connaissance de ce type de soin alors qu’elle peut en ressentir le besoin. Lui demander de se déplacer alors qu’elle n’en est pas l’instigatrice, peut lui donner le sentiment d’être dépossédée de son libre arbitre et ne favorise pas d’emblée un climat thérapeutique de confiance.

C’est aussi autour de cette demande particulière, que pour une personne âgée, rester dans son cadre de vie, son environnement évite non seulement une certaine appréhension et/ou frustration, mais favorise une meilleure ouverture au dialogue et à l’acceptation d’une mise en place du soutien psychologique. Au cours des différentes interventions qui ont lieu à son domicile, la personne âgée devient actrice de sa prise de rendez-vous thérapeutique: nous choisissons ensemble, le moment le plus adéquat à ce type de soin.

Enfin, Le cadre de vie de la personne âgée peut également être un membre à part entière de la thérapie. Il s’y mêle reviviscence de souvenirs, d’anecdotes, d’histoires et de croisements de vie dans un même lieu et il devient le terreau fertile pouvant alimenter autant de nouvelles stimulations cognitives que le contenu psychique et physique de sa thérapie. L’environnement devient alors le support et le vecteur des associations libres du patient.

En outre, lors de ce type de suivis, j’attache une importance particulière au fait que le patient mais aussi l’aidant puissent avoir chacun des entretiens individuels, tout deux étant protagonistes du bon déroulement du travail thérapeutique à engager.


Ma pratique

Comme dans tout type de suivi thérapeutique, une neutralité bienveillante et une écoute attentive des attentes et désirs de chacun demeurent. Dans ce cadre particulier, j’opte pour une approche davantage intervenante afin de favoriser une relation thérapeutique qui se veut étayante et dynamique pour susciter une potentielle nouvelle appétence relationnelle autant chez la personne âgée que chez l’aidant.

Auprès de personnes âgées

Il est aisé de concevoir l’idée selon laquelle, comme à chaque période de la vie, sont convoquées les grandes problématiques spécifiques de la condition humaine. Celles-ci conjuguent les représentations que le sujet construit et investit lui-même, et s’inscrivent d’une part dans l’axe du narcissisme et d’autre part, dans le champ des expériences et des représentations qui relèvent de l’axe objectal. La traversée du vieillissement est une aventure singulière qui s’entend en termes de changements et de rites de passage. Il peut mettre à rude épreuve le narcissisme et la qualité de ce dernier, car il met en en jeu l’identité du sujet vieillissant (qui voit son corps changer et ses capacités intellectuelles et idéiques diminuer).

Par ailleurs, si le vieillissement appartient au temps linéaire de la vie, il doit aussi être appréhendé au regard de l’intemporalité de l’inconscient, constituant la source vive et dynamique de la vie psychique de chacun. Si elle ne peut s’y réduire, l’expérience du vieillissement est immanquablement marquée du sceau de la perte et d’une mise à l’épreuve de l’appareil psychique à la traiter. Les pertes peuvent être des plus variées au cours d’une vie: perte d’un être cher, perte ou diminution des capacités physiques ou psychiques, perte d’une activité professionnelle, perte d’un logement et d’une façon générale, perte d’un état d’équilibre entre psyché et soma. Dans certains cas, ces pertes deviennent source d’angoisse en plus de porter atteinte à l’image de la personne vieillissante avec son cortège de blessures narcissiques. L’importance d’un suivi thérapeutique peut se lire entre ses lignes, face à une dépréciation trop grande de la personne âgée envers elle même.

Le travail thérapeutique auprès de cette population offre différentes approches. Il se conçoit bien évidemment sur le versant des renoncements successifs que le vieillissement induit, mais il s’axe aussi sur une valorisation de ce qui « reste » : un esprit, un intellect, une certaine mobilité, une présence, une histoire de vie. Plus simplement aussi, le travail thérapeutique s’entend comme une remise en sens et en ordre d’un parcours et d’une histoire. Ce travail montre ses bénéfices sur les personnes âgées, pour l’appétence narcissique qu’il suscite. De même, travailler sur la question du renoncement, induit une volonté personnelle du patient à devoir réaménager ses assises face à une réalité différente de ce qu’il pouvait espérer. Cette prise de conscience est un renfort pour l’aider à apprendre progressivement à composer une nouvelle vie avec des données que le patient n’a pas forcément choisies au départ. Le travail thérapeutique est ce travail de deuil et d’acceptation de ce que la personne a été, et peut être aussi de ce qu’elle espérait être. Ce réaménagement s’effectue dans un déploiement psychique lent, susceptible de répétitions, de stagnation et de régression. Mais c’est un travail psychique qui peut amener petit à petit de nouveaux repères, et prendre en considération les nouvelles coordonnées de sa propre consistance et cohérence. Il peut être alors une véritable contribution à un « mieux vieillir », surtout quand il est décidé dans un maintien à domicile.


Auprès de l’aidant.

S’il est clair que la personne dépendante a besoin d’être aidée psychologiquement, je prends soin également d’être attentive aux aidants. Ils font partie intégrante du quotidien d’une personne âgée et leur proposer une écoute particulière est indispensable selon moi, au bon fonctionnement du suivi thérapeutique à domicile.

Il m’a souvent été donné de rencontrer des aidants pouvant être épuisés moralement, ou dépassés par la situation dans laquelle ils se trouvent. En effet, la personne aidante n’est pas toujours préparée aux différentes fonctions induites par ce statut, ni à l’accompagnement physique et psychique qu’une personne âgée dépendante nécessite. Travailler sur la relation aidant/aidé est donc un levier puissant quant au suivi thérapeutique d’une personne âgée qu’il ne faut pas négliger ou écarter. L’aidant fait très souvent face à des situations plus ou moins difficiles à gérer d’un point de vue émotionnel et psychique.

Solitude, culpabilité, travail de deuil difficile, sentiment d’impuissance, sont régulièrement des ressentis que je décèle dans leurs discours. C’est pour cela que ma fonction et ma présence en tant que psychothérapeute auprès de l’aidant est tout aussi primordiale: je lui permet d’avoir un espace d’échange et un temps à lui. S’il le désire, il peut y trouver une écoute et un lieu où trouver un soutien à son quotidien parfois traduit comme « étouffant » et douloureux.

Lorsque cela est possible, j’offre la possibilité à l’aidant de venir à mon cabinet, afin d’opérer non seulement une coupure physique mais aussi psychique à son quotidien.

En dernier lieu, grâce à nos échanges, l’aidant m’offre également un autre prisme quant à mon travail thérapeutique auprès de son parent. En fonction aussi de l’état physique et mental de la personne âgée, l’aidant prend également le rôle de « conteur » d’une vie. Il me raconte le parcours de son parent, il offre alors une voix à une vie, une personnalité, et m’apporte une aide plus que précieuse quant à l’ajustement de mon travail auprès de son parent. Ce point particulier m’amène à la dernière partie de ce travail thérapeutique que j’effectue à domicile.


Auprès de personnes ayant une maladie neuro-dégénérative et troubles apparentés

Au cours de ma pratique, il m’est également arrivé de travailler auprès de personnes âgées présentant une maladie neuro-dégénérative (type Alzheimer, Parkinson), ou porteuse d’une démence. Je souligne que les frontières entre les différentes formes de démence ne sont pas nettes et les formes mixtes sont fréquentes. Il existe de nombreuses formes de démence, la maladie d’Alzheimer étant la forme la plus commune et serait à l’origine de 60-70% des cas (selon l’OMS).

La démence est un syndrome, généralement chronique ou évolutif, dans lequel s’observe une altération de la fonction cognitive (capacité d’effectuer des opérations de pensée), plus importante que lors du vieillissement dit « normal ». Elle affecte la mémoire, le raisonnement, l’orientation, la compréhension, le calcul, la capacité d’apprentissage, le langage et le jugement. Une détérioration du contrôle émotionnel, du comportement social ou de la motivation accompagne souvent les troubles de la fonction cognitive.

Il serait faux de dire que la démence n’est pas une maladie difficile à gérer. La famille voit un être cher changer, se transformer. C’est une maladie invisible et imprévisible qui épouse les formes de l’être tant aimé. Elle induit un travail de deuil particulier d’une personne qui disparaît un peu plus chaque jour, alors que son corps lui, reste vivant. L’âme subsiste mais il est parfois complexe d’interagir avec elle au point que cela devient difficile de croire qu’elle survit encore sous cette pathologie. Dérangeante et stigmatisante, la démence est ce langage à l’orée du nôtre, mais elle est un enseignement au-delà des douleurs qu’elle suscite.

La démence est non seulement cette maladie qui attaque toutes les formes de liens, mais les difficultés de communication liées aux troubles de la personne doivent faire l’objet d’une prise en charge plus particulière. La démence, d’un point de vue psychanalytique, se comprend comme cette maladie du lien, où elle vient de manière manifeste, désunir tout ce qui fait de l’être humain un être social : comportement modifié et inadapté, perte progressive de son histoire, de son identité, de l’environnement familial et du monde, en somme, de ce qui nous constitue…

« Il y a une raison derrière chaque comportement des personnes très âgées désorientées [..] 

Qu’il soit ou non désorienté, chaque être humain garde sa valeur»

NAOMI FEIL. 

La démence enferme petit à petit celui qui la porte dans un monde psychique archaïque et primaire. Il n’est alors possible d’(inter)agir avec la personne qu’en se proposant comme environnement bienveillant et réconfortant, sans pour autant avoir des signes et manifestations aussi visibles qu’il peut être légitime d’en espérer…

La thérapie s’entend ici par le fait de signifier une présence bienveillante et sécurisante auprès de la personne démente, qui se défait des échanges verbaux classiques. La parole reste bien évidemment, mais elle est corrélative d’un comportement qui se veut thérapeutique. Une clinique du présent, ajustable et modulable, une clinique par le geste, la présence, le silence parfois et la patience. Et si la démence attaque les liens, la démarche psychothérapeutique se place dans cet interstice: c’est au thérapeute, sur différentes strates d’agissements de redonner lien, sens, et conduction à ces manifestations afin de remettre en lumière l’humain derrière la démence. En effet, dès qu’il est possible d’observer et de comprendre ces états psychiques, on découvre que la vie psychique y est bien plus présente qu’on le suppose ou s’en défend initialement. Elle ne s’exprime plus par des voies traditionnelles, mais les mémoires affective et sensorielle restent et demeurent présentes. Dans ces cas de figure, mon travail s’oriente sur un établissement de liens entre différentes parties de la psyché de la personne démente, afin d’apporter une potentielle nouvelle communication entre elles. Offrir également une meilleure compréhension de l’état psychique de la personne démente à son entourage, et apporter à ce dernier des possibilités et des outils pour « mieux vivre » et comprendre cette situation au quotidien.


Si vous êtes dans une de ses situations, autant personne âgée, qu’aidant, accompagnant de personnes âgées, je suis disposée à vous aider dans cette étape de votre vie. Un premier contact téléphonique ou par email est bien évidemment possible afin d’établir ensemble vos attentes et besoins, et voir si mon approche peut vous aider à affronter cette situation difficile. Vous n’êtes pas seul